Prélude
C’est par une nuit de pleine lune qu’il est arrivé, le berceau brillait de milles éclats générés par le rebondissement des rayons de lune sur l’indescriptible matériau qui constituait l’objet. Dans l’immense parc de la demeure de Peter Fray, le silence régnait. Lui-même était dans sa chambre à rêvasser sur son prochain film dont le personnage principal était une femme magnifique aux allures mystiques. Cette femme, il l’avait rencontré il y a quelques semaines : des longs cheveux dorés, des formes voluptueuses, elle était l’exemple même de la beauté. Elle était apparue au pied de son lit sans vraiment qu’il sache comment et avait partagé avec elle la meilleure nuit de sa vie. Puis elle avait disparu comme par enchantement laissant à Fray l’impression que tout cela n’était qu’un rêve. Le silence se brisa bien vite, au loin un petit cri résonna mais Peter Fray n’y prêta guère attention encore tout occupé de son fugace amour.
La porte d’entrée s’ouvrit sur Joséphine, la gouvernante de la grande demeure, une dame âgée d’une soixantaine d’année aussi gentille que serviable et d’une bonté à toute épreuve. Cette dernière cherchait l’origine de ce bruit en plein milieu de la nuit. Elle découvrit alors à ses pieds le berceau doré et l’origine de ce tapage nocturne. Dans l’objet céleste résidait une petite fille, celle qui serait bientôt nommée Lysandra Zelda Fray.

Chapitre 1 : L’enfance glorieuse
« Lyzzie, viens faire tes devoirs » appela une voix fatiguée. Lysandra, bras croisées sur sa poitrine défiait du regard Joséphine, peu décidée à accéder à sa demande. « J’veux pas » déclara-t-elle du haut de ses 6 ans. La petite fille au caractère déjà bien trempée était d’une beauté fascinante : ses cheveux blonds lui arrivaient déjà sous les omoplates et ses grands yeux verts étaient d’une grande utilité quand il s’agissait de demander à Papa quelques jouets. Malgré cela il semblait que Peter Fray ne lui portait guère d’intérêt laissant à Joséphine le soin de s’occuper de la petite fille. Ce travail n’était pas de tout repos et la vieille gouvernante, sentait que l’heure de se retirer de la demeure allait bientôt sonner. Chaque année, elle repoussait l’inévitable moment de partir à la retraite, refusant de laisser la petite Lizzie seule entre les mains de son père. Joséphine depuis bientôt deux ans s’évertuait à convaincre Monsieur Fray, bien décidé à faire de sa fille une petite star, que cette dernière était encore bien trop capricieuse pour rentrer dans ce monde si difficile. La gouvernante savait, qu’une fois partie, Lysandra serait envoyé sans ménagement jouer la starlette malgré son jeune âge. La beauté de la petite fille bien qu’elle fût un don sonnait, alors, comme une malédiction aux oreilles de Joséphine.
Voilà un an que celle qui s’apparentait le plus à une mère avait quitté la demeure. Joséphine partie, Lysandra s’était retrouvée à collectionner les nourrices complètement dépassées par la témérité de la demoiselle, décuplée par l’impression d’avoir été abandonnée suite au départ de sa vieille gouvernante. « Lysandra, suis moi dans mon bureau. » Lizzie assise devant la télé, releva la tête à l’entente de la voix de son père, le producteur avait déjà tourné les talons vers son environnement de travail. La petite fille bien trop ravie d’avoir un peu d’attention de son père éteignit la télévision et se rua à la suite de son paternel. « Arrête de courir et assis toi. » Lysandra prit place dans l’un des fauteuils devant le grand bureau d’acajou, recouvert de dossier en tout genre. « Est-ce que ça te dirait de passer plus de temps avec moi ? » Un grand sourire s’afficha sur le visage de Lysandra qui acquiesça rapidement. « Alors écoute moi bien, tu vas tourner dans l’un de mes films. Tu vas devoir obéir à la moindre chose que je te dis, Lysandra suis-je claire ? » Lysandra désappointée haussa les épaules. Le ton de Peter Fray monta d’un cran « Suis-je claire ? » Sourcils froncés, elleacquiesça. Il lui tendit un dossier « Donne ça à ta nourrice et dis lui de te le lire. » Lysandra attrapa le dossier et disparut voir sa nourrice. C’est ainsi qu’elle incarna le rôle de Gabriella Weather, 10 petites minutes de gloire dans le grand film comique « Nobody know’s » de son géniteur, et la beauté de la petite fille fit le tour d’Hollywood. Rapidement on se battit pour obtenir Lysandra Fray comme son père l’avait si bien prévu.

Chapitre 2 : La descente aux enfers
Lysandra commence par tourner dans des séries pour enfants, avant de faire une énorme avancée en décrochant l’un des rôles principaux du film catastrophe « Brave New World ». Ce film achève de faire connaître la jeune fille de 10 ans au grand public. Les rôles s’enchainent alors sans discontinue, rendant difficile la capacité de la jeune fille à jongler entre le cinéma et les cours. Si les jours se font difficiles, Lyzzie trouve un certain réconfort en la présence de son père, bien décidé à être l’agent de la nouvelle coqueluche d’Hollywood. La fatigue, le stress, voilà des choses dont on entend rarement parler dans les magazines people et pourtant ces faits sont bien réels. Les heures passées à travailler, répéter, tourner, sourire, saluer, finissent par faire grandir Lysandra bien trop vite. Elle réfléchit comme une adulte, agit comme une adulte, parle comme une adulte, lui enlevant toute part d’innocence à à peine 12 ans.
« Allez viens Lyzzie ! Goute ! Je te promets que c’est bon » La jeune fille posa son regard sur son partenaire : Judas, 14 ans, son frère dans le film dont il venait d’achever le tournage. Lysandra était suspicieuse face au breuvage qu’il tenait dans sa main. Elle savait parfaitement de quoi il s’agissait. Attirée par l’envie de gouter à cette boisson interdite, elle tourna la tête vers son père qui, comme d’habitude, était plus occupé à flirter avec des pseudos star qu’à s’occuper de sa fille. Sourcils froncés elle attrapa rapidement le verre et l’avala d’un trait sous le regard médusé de Judas. Elle toussa quelque peu et sentit l’alcool bruler sa gorge, son œsophage mais lui apporter, étrangement, une certaine sensation de bien-être. La jeune fille enchaine alors les verres, avant de finir quelques heures plus tard dans les toilettes de la salle de réception.
Assise dans l’une des nombreuses cabines, Lysandra attend que sa nausée passe. La tête posée contre le carrelage frais qui recouvre le mur, elle pense à tout ce qu’elle a vécue, se demande si tout cela en valait vraiment la peine. Certes elle avait passé plus de temps avec son père mais au fond elle savait que quoi qu’elle fasse rien ne serait suffisant. Tout ce qu’elle faisait ne rimait à rien. Prise d’un soubresaut, elle s’accroche à la cuvette avant de vomir tout ce qu’elle a pu engloutir en une heure. Au bout de quelques minutes, épuisée, Lysandra se cale contre le mur et s’endort.
« T’étais où bordel ? » Peter attrapa Lysandra par le poignet avant de la trainer vers sa chambre. S’était-il inquiété ? Tenait-il alors vraiment à elle ? La jeune fille venait à peine de rentrer, il était alors 10 heure du matin, elle avait passé la nuit dans les toilettes sans se réveiller malgré le sol froid et sa position inconfortable. Les cris de son père venaient renforcer sa migraine déjà lancinante, elle tenta d’ignorer ce bruit insupportable : sans grande réussite. « Ne refais plus jamais ça Lyzzie ou je te jure que tu vas avoir affaire à moi. » Il pointait sur elle un doigt furieux, son visage était rouge de colère et la jeune fille restait impassible. Elle se promettait intérieurement de recommencer le plus souvent possible : à force de s’inquiéter, peut être comprendrait-il qu’il l’aimait.

Un an avait passé, un an où la demoiselle enchainait bêtise sur bêtise, si au début elle n’avait eu que des problèmes d’alcool tout cela avait bien rapidement évolué vers le sexe et la drogue, choses si accessibles dans le milieu du cinéma. Lysandra faisait déjà trop femme pour son âge, il semblait qu’en à peine un an elle avait gagné en beauté et en confiance en elle. Elle faisait ce qu’elle voulait des hommes comme des femmes, du producteur à l’acteur, de la standardiste à la scénariste, il semblait que tous se plaisaient à faire ses 4 volontés. Même son père montrait des signes de tendresse à son égard. Néanmoins Lyzzie ne cherchait pas à savoir d’où cela pouvait bien provenir, bien trop heureuse de profiter de ce don du ciel. Alors qu’elle jouait dans un film fantastique, peuplé de personnes déguisées en créatures de tout genre, elle se lia d’amitié avec un acteur qui jouait un satyre dont le costume était, il faut le dire, rudement bien imité. Il s’appelait Jethro venait de New-York et se plaisait à dire à Lysandra qu’il était un véritable fan d’elle. Ravie, la jeune fille l’invita à une soirée de jeunes acteurs qui terminerait encore très certainement en orgie.
« Bah, tu n’as pas enlevé ton costume ? » Un verre à la main, Lyzzie observait son ami toujours pourvu de sabots à la place de pieds. « Lyzzie faut que je te parle très sérieusement. » « C’est la fête Jethro, arrête de vouloir me gâcher ma soirée. Oui on sera à l’heure pour le tournage demain matin. » Sans vraiment qu’il eut le temps de répliquer, un garçon de 16 ans attrapa Lysandra par la taille et l’attira vers lui avant de l’embrasser. Jethro leva les yeux au ciel avant de se caler dans un coin, bien décidé à garder un œil sur tous les participants. Ce dernier se demandait si c’était réellement une bonne idée de l’emmener à la colonie mais quel autre choix avait-il ? Il savait que ça serait difficile pour elle de dire au revoir à ce monde pour se lancer dans un destin totalement irréel.
Les heures passèrent et Jethro s’inquiéta de ne pas voir réapparaître Lysandra. Il entreprit de fouiller l’immense maison qui servait de lieu à la soirée et finalement il finit par la retrouver, titubante, sortant d’une chambre. Le satyre soupira devant ce triste spectacle mais vint l’aider à marcher. « Je te raccompagne chez toi Lyzzie » La jeune fille acquiesça difficilement de la tête et se laissa guider en dehors de la villa. Après avoir parcouru quelques rues, le satyre se crispa et regarda au loin. « Lyzzie, il va falloir que tu cours, tu m’entends ? Je t’en supplie. » Lysandra secoua la tête à la négative, incapable de faire un pas sans se tenir à un mur. Relevant la tête, elle aperçut enfin ce qui apeurait son ami : un chien énorme se dirigeait droit sur eux, ses pattes puissantes martelaient le sol. Lyzzie n’eut même pas eu le temps de crier que Jethro l’attrapait par le poignet et la tira derrière lui, la jeune fille trébuchait sans arrêt et le monstre gagnait peu à peu du terrain. Elle finit par tomber pour de bon, Jethro se retourna vers elle avant de se remettre à courir « Je reviens Lyzzie !», face à la peur Lysandra se sentit décuvée à vitesse grand V, elle se releva et chercha un moyen de gagner un peu de temps. Elle attrapa un couvercle de poubelle qu’elle lança tel un frisbee vers le chien. Quelque peu assommé le monstre secoua la tête et la jeune fille se remit à courir mais une patte puissante vint s’écraser sur son dos faisant valdinguer la jeune fille contre un mur. Lysandra le dos couvert de trois griffures et se croyant perdue commença à fermer les yeux tandis qu’elle sentait le souffle chaud de l’animal se rapprocher de son visage. Mais, un bruit de moteur au loin fit son apparition, Jethro au volant d’un taxi sortit de nulle part et fonça vers le chien qui se recula pour éviter la voiture. Lysandra en profita pour monter dans le taxi et les deux compères roulèrent vers la colonie des sangs mêlés.

Chapitre 3 : Le renouveau.
Lysandra regarda autour d’elle toujours éberluée par l’endroit où elle était et par les choses que lui avait racontées Jethro. Ce dernier s’avérait être un véritable satyre, chose qu’elle peinait à croire. Autour d’elle, les autres enfants la dévisageaient : beaucoup d’entre eux la connaissait pour l’avoir déjà vu au cinéma et semblait craindre sa venue ici. Adieu l’anonymat. On lui fit regarder un DVD que cette dernière écouta avec distance, loin d’être prête à croire à toutes les fables qui y étaient racontées. « C’est n’importe quoi Jethro. Tout cela n’est qu’une blague. Je peux pas être une demi-déesse, je n’ai même pas de pouvoirs. » La jeune femme dardait un regard furieux sur son compagnon, lui reprochant de s’être trompé de personne. Alors que Lyzzie criait encore et encore, l’attribut de sa mère apparut au dessus de sa tête. Un sourire se forma sur les lèvres de Jethro, fier de lui. « Lysandra, te voilà reconnue comme fille d’Aphrodite, déesse de l’amour et de la beauté. »
A la fin de la journée, une jeune fille vint vers Jethro et Lysandra. « Lyzzie je te présente Danaé, elle va se charger de te faire visiter le camp. » La fille d’Aphrodite détailla Danaé avec un air suspect, cette dernière était beaucoup trop différente de ce qu’elle avait connu. Elle avait un air calme, naïf, doux et enfantin qui exaspérait Lyzzie. « J’ai pas besoin d’elle Jethro. » « Tu n’as pas le choix. » Jethro la fusilla du regard avant de la laisser entre les mains de Danaé.

Les jours passèrent et les addictions revinrent au galop, secouant Lysandra de spasmes affreux. Danaé toujours aussi excédante, restait à ses côtés tandis que Lyzzie était à l’infirmerie à combattre ses sombres démons. « Je veux partir » « Tu es mieux ici. » « Tu… t’en sais rien du tout. » Danaé ne répondit pas et se contenta de lui sourire doucement avant de lui apposer un peu d’eau fraîche sur le visage. Lysandra la repoussa violemment « Laisse-moi tranquille. » Danaé reposa la coupelle d’eau et se leva. « Je repasserai demain. » « C’est ça. » Lysandra attendit la nuit pour sortir de l’infirmerie. Partir c’est tout ce qu’elle avait en tête, s’enfuir d’ici, retrouver les plateaux de tournages et la drogue surtout. Elle courut à en perdre haleine, une énergie toute nouvelle alimentée par le manque qui la prenait aux tripes. Elle finit par se perdre dans la forêt et épuisée elle finit par s’abriter au pied d’un chêne, tremblante sans se rendre compte des dangers qu’elle courait. Une patrouille fût envoyée la chercher et dès le lendemain elle se retrouva de nouveau à l’infirmerie à se faire sermonner comme jamais par sa chef de bungalow et par le chef de la sécurité.

Enfermée nuit et jour, au bout de trois semaines, ses addictions finirent par se taire et l’on finit par la laisser aller et venir comme il lui semblait dans le camp. Danaé était toujours là, à la surveiller comme son ombre et excédée Lysandra par un beau jour décida de s’en débarrasser pour de bon. Elle utilisa son don, qu’elle avait appris peu à peu à utiliser, pour charmer des Arès afin qu’il traumatise quelque peu la jeune fille. Malheureusement pour elle, les choses ne tournèrent pas comme prévu, les Arès bousculèrent la jeune fille et commencèrent à passer des mains vicieuses le long de ses cuisses sous le regard interloqué de Lysandra. Danaé commençait à paniquer et Lyzzie finit par se ruer à son secours, consciente que les choses allaient trop loin. Danaé était assisse par terre à pleurer et Lysandra vint passer un bras autour de ses épaules. « Ca va, chut, ils sont partis. Je te le promets » C’est ainsi que les deux jeunes femmes se lièrent d’amitié, la fille de Déméter lui raconta son passé aux épreuves douloureuses et Lyzzie comprit qu’il était nécessaire que quelqu’un veille sur Danaé. Job qu’elle remplirait coûte que coûte.

Au fil des mois, Lysandra trouva sa place au sein de la colonie se faisant appeler par son deuxième prénom, Zelda, pour marquer la rupture avec son passé, avec le cinéma, avec la drogue. Si les débuts furent difficiles, la colonie fût pour elle une véritable renaissance.